Les hommes ont commencé à creuser. Mineurs paysans s'agenouillant au sol, doigts en prière sur les veines noires du paysage. La terre a été vendue, l'horizon percé de hautes cheminées. Du plus loin que portait le regard, on les voyait, soufflant et crachant un ciel nouveau qui bientôt, recouvrirait nos forêts, nos villages, nos enfants. Les hommes ont continué à creuser. Gueules profondes, le long desquelles on fit descendre les bêtes de traits qui demeureraient dans le fond de la mine, leur vie durant. Les visages se recouvrirent de poussière. Noires les mains, noir le blanc des yeux, noire la mémoire. On s'est enfoncé dans la terre, comme on s'enfonce une aiguille sous la peau ; la pluie que nous abandonnions à la surface du monde et très loin dans le puits, la chaleur et notre soif insatiable. Les terrils se sont dressés, avalant le ciel et la terre et puis, un jour, la montagne s'est tue. Le bruit des machines a cessé, le brasier des fourneaux s'est éteint, les portes immenses des usines se sont fermées et il nous a fallu oublier.
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